Le pouvoir d'un seul

La Tunisie est passée, depuis 2011, du gouvernement d'un seul au pouvoir de tous. C'est la transition démocratique, un parcours certes semé d'embûches, mais censé à terme conduire à une démocratie stable. Une transition requiert un stade intermédiaire, celui de la consolidation démocratique, laquelle a lieu lorsque la démocratie devient la seule règle de jeu dans la cité. Or, le 25 juillet 2021 met un cran d'arrêt à cette dynamique. Il ouvre une nouvelle séquence, un « retour en arrière » vers un régime autoritaire : il a lieu quand la qualité de la gouvernance démocratique se détériore, bafouant les règles du vivre-ensemble démocratique. La régression est de type populiste. D'où l'interpénétration entre le pouvoir d'un seul et le populisme. Ce recul n'est pas forcément un simple retour au régime du 7 novembre 1987 (un système autoritaire verrouillé]. Pourtant le constat est, pour le moment, sans appel : K. Saïed gouverne seul, sans partage. Quelle est la nature de ce pouvoir ? Est-ce une dictature, une tyrannie, un despotisme, un régime présidentialiste, un populisme plébiscitaire, ou qu'est- ce d'autre encore? La question est ouverte. Non que ce livre ne veuille pas prendre parti, mais parce que le pouvoir personnel de Kaïs Saïed est sui generis, spécifique, inédit et en gestation. Chacune des contributrices, chacun des contributeurs de ce livre l'a libre- ment qualifié selon sa propre perception de l'homme et des faits. Le collectif prend en revanche le parti de démonter le dispositif, en voie de parachèvement, mis en place le 25 juillet 2021.